Bonjour à toutes et à tous






" le voyage pour moi, ce n'est pas arriver, c'est partir. C'est l'imprévu de la prochaine escale, c'est le désir jamais comblé de connaître sans cesse autre chose, c'est demain, éternellement demain"
Roland Dorgelès







jeudi 17 février 2011

La vallée du Draa et les oasis du Sud


Nous quittons donc Agdz direction le sud vers Zagora en longeant la vallée du Draa. Ce fleuve, né dans le massif de l'Atlas, arrose une oasis sur près de 200 km - d'Agdz jusqu'à Mhamid - avant de se perdre dans les sables. De Mhamid jusqu'à son embouchure sur l'Atlantique au sud de la plage blanche, le fleuve reste « fantôme » pendant 750 km, ce qui en fait théoriquement le plus long cours d'eau du Maroc. D'après les textes anciens, sur ses rives se prélassaient des crocodiles et toute la région était prospère.

Sur le départ, avec nos amis


Tout le long du parcours s'étire une longue suite de palmeraies parsemées de ksour - villages fortifiés - et de kasbah - l'équivalent de notre château fort - toujours construits en pisé et pour la majorité d'entre eux, plutôt en bon état. Il y a juste une centaine de km pour arriver jusqu'à Zagora où nous comptons faire halte.


C'est donc aux alentours de midi que nous arrivons dans la petite ville. Son ancien emblème, le panneau indiquant "Tombouctou 52 jours" a été rasé lors de la construction du siège de la province. Un nouveau a été installé, mais il n'a pas la notoriété de l'original !


En effet, si la route goudronnée continue jusqu'au village de Mhamid, à environ 80 km, nous sommes déjà à la porte du désert.

A peine installés, le dynamique patron du camping vient d'ailleurs nous proposer une sortie désert de deux jours en 4 x 4 + ballade en chameau ! Après réflexion, nous décidons d'accepter sa proposition et la virée est décidée pour le lendemain. Nous partons voir un peu la ville et allons acheter les chèches - long turban à nouer sur la tête - que l'on nous demande comme indispensable pour la randonnée dans le désert ! Puis nous continuons la promenade dans la ville avec tous les magasins pour touristes "entrez, juste pour le plaisir des yeux …" , les inévitables souks, etc … et nous rentrons tranquillement à pieds. Il ne fait d'ailleurs pas tellement chaud et un vent assez froid souffle en permanence.

Le lendemain à 9 h 00 nous sommes prêts pour le départ et le 4 x 4 et là avec son chauffeur et Omar notre accompagnateur.


Tous les deux portent le chèches, mais s'ils sont berbères ce ne sont pas des nomades. On nous apprend à mettre le turban et nous voilà partis ! Nous prenons d'abord la route en direction de Mhamid, puis une piste qui nous conduit à travers la palmeraie jusqu'au village de Nesrate. Il est habité majoritairement par une population à peau noire, les Haratin, descendants d'esclaves, comme beaucoup d'autres villages de cette région. Ils cultivent des parcelles dans la palmeraie : il y a du blé, des fèves, de la luzerne pour les animaux. Pas de routes, comme dans beaucoup de villages, mais la piste, des maisons en pisé, de petits ânes tirant des carrioles, beaucoup d'enfants et beaucoup, beaucoup de poussière qui tourbillonne dans le vent. Ensuite, nous retrouvons la route pour la quitter à nouveau pour une piste qui s'enfonce dans le désert, abandonnant la vallée du Draa.



Au départ, c'est un désert de cailloux, avec quelques arbustes et de maigres buissons, quelques dunes de sable. Peu à peu, le décor change : les montagnes restent toujours en fond tandis que l'on s'enfonce de plus en plus dans cette longue plaine. Parfois des passages dans le sable où le 4 x 4 semble glisser

d'autres où il "nage"




puis à nouveau les cailloux. Vers 13 h 00, nous arrivons à nos premières dunes. Nous nous arrêtons à un campement nomade

- installé pour les touristes ! - Tout le décor est là : un jeune en djellaba et turban, quelques chameaux, et les tentes : certaines pour dormir, plus petites, et une grande tente pour les repas avec tapis, coussins et quelques tables avec tabourets.


On nous offre bien sûr le thé, puis un excellent repas fait de salade marocaine et de brochettes de volailles très agréablement parfumées. En fait, nous sommes seuls dans cette grande tente et nous discutons un peu avec le jeune nomade. Tantôt il garde les chèvres de la famille, tantôt il s'occupe du campement, en se relayant avec ses frères. Il parle un peu le français et l'espagnol pour se débrouiller avec les touristes et espère se marier bientôt. C'est Omar, notre accompagnateur qui a fait la cuisine et il se débrouille comme un chef !

Après le repas, nous reprenons la piste jusqu'à l'oasis sacrée Abd er Rahmane - nom du marabout qui vivait là et où il y a son tombeau. Une petite source jaillit de terre en plein désert et permet l'existence de cette petite palmeraie en plein désert.


Nous reprenons la piste pour arriver vers les 16 h00 aux dunes de Chigaga, but de notre expédition ! Là, les dunes s'étendent à perte de vue et c'est vraiment impressionnant ce moutonnement du sable.


Nous posons les sacs dans un nouveau campement un peu dans le même genre que le précédent, nous nous délassons un peu en grimpant dans les dunes,

puis nous partons pour la balade à dos de dromadaire.


C'est haut un dromadaire ! Et çà fait un peu peur quand il se redresse, mais ensuite, on est très bien assis et nous voilà partis ! Nous nous bombardons mutuellement de photos surtout avec notre chèche sur la tête ! Nous nous enfonçons dans les dunes pendant un petit moment, puis rentrons au camp où le dromadaire s'affale pour que l'on puisse démonter. Finalement cette petite virée s'est très bien passée et nous repartons dans les dunes admirer le coucher du soleil : c'est un petit bout de désert, mais c'est malgré tout impressionnant et magnifique à regarder. On n'a pas envie de parler, juste de se remplir les yeux … Mais dès le soleil disparu, il fait froid et nous rentrons vite au campement.
Là aussi, nous sommes seuls avec le chauffeur, le guide et le "permanent" du camp. On nous sert un bon repas fait d'une soupe de légume et un tagine ; puis c'est musique et chants berbères. Ici, pas de télévision et le téléphone ne passe pas… donc, après cet intermède musical, nous partons nous coucher. C'est qu'il fait froid : ils nous ont installés 6 couvertures avec un matelas au sol recouvert tant bien que mal d'un drap. Un fois enfouis là-dessous, tout habillés (!) nous ne pouvons plus bouger ! Ce ne sont pas des couvertures en synthétique ! Pour aller aux toilettes/douche, une minuscule lampe de poche : pas facile de retrouver la tente au retour. Nous passons une nuit très calme, mais très froide et pas question de prendre une douche au réveil : il a gelé la nuit.

Au lever du jour, réveillés par la lumière, nous sortons admirer les premiers rayons du soleil sur les dunes. Puis on nous sert un bon petit déjeuner dehors.


C'est magique ! Mais froid … Après une dernière balade, nous reprenons la piste du retour, direction Mhamid. C'est le dernier village où s'arrête la route goudronnée et ou commence les pistes. Il semble se consacrer d'ailleurs exclusivement à toute forme de randonnées dans le désert.

Sur le chemin du retour, nous visitons une poterie où vient de se déverser un car de touristes. Tous les acteurs sont en place pour la démonstration : "fabrication" de la terre glaise, tour du potier, enduit céramique, fours et bien sur le magasin qui fait suite …




Nous sommes contents de repartir, d'autant qu'un couscous nous attend au camping … et une bonne douche chaude !

C'est la première fois que nous allions dans le désert : bien sur, c'est une toute petite approche mais peut-être un jour aurons nous l'occasion d'y faire une randonnée de plusieurs jours pour mieux s'en imprégner. Nous choisirons malgré tout une saison un peu plus chaude, le printemps par exemple !

Le lendemain après-midi, nous décidons de faire l'ascension du Djebel Zagora qui domine la ville. L'ascension n'est pas trop difficile ; nous croisons un troupeau de dromadaires puis poursuivons notre grimpette. A l'arrivée, nous sommes "cueillis" par un militaire qui garde les antennes installées au sommet. Nous pouvons malgré tout admirer le paysage et il en vaut la peine : nous dominons la vallée du Draa et Zagora s'étend à nos pieds,


les palmeraies qui longent le fleuve s'étendent jusqu'à l'horizon, bornées de part et d'autre par les montagnes. Pour redescendre, nous empruntons la piste pour les 4 x 4 : à peine la place pour les roues entre la paroi et le précipice, sans la moindre barrière de sécurité !

Nous sommes bien contents de descendre sur nos deux jambes !

Par cette piste, nous faisons le tour de la montagne : sur ce versant, c'est le désert caillouteux qui s'étire entre les montagnes arides.



Aujourd'hui nous faisons un peu de farniente au camping. Il y a moins de camping-cars ici : plusieurs land-rover avec tentes de toit, des motards avec des tentes. Et, souvent, sans être des retraités, ce ne sont pas de petits jeunes ! En fin de matinée, nous partons pour Zagora faire quelques courses. Evidemment, nous n'échappons pas aux sollicitations des commerçants : les Marocains sont des gens absolument charmants et d'une gentillesse désarmante : ils quittent leurs magasins pour vous montrer le chemin, ne semblent pas connaître les mots de colère, d'énervement mais, mais … pour vous entraîner dans leurs magasins, ils sont d'une persévérance rare : toutes les astuces, les discours qu'ils peuvent inventer, avec une patience infinie, même si vous leur affirmer que non, vous n'allez pas acheter, que vous avez déjà, etc … et c'est tous les jours que çà recommence ! Mais avec eux, impossible de se fâcher, ils sont toujours calmes et souriants ! Quand aux enfants, ils peuvent vous suivre pendant un bon moment "bonjour monsieur un stylo, bonjour madame un ballon, un bonbon, un dirham" et tout çà avec le sourire. Nous n'avons encore jamais vu, depuis un mois et demi que nous sommes ici, un Marocain se mettre en colère, que se soit entre eux, avec les enfants, où n'importe qui. Ils nous donnent une bonne leçon de bonne humeur et surtout de courtoisie dans les rapports humains : à quoi çà sert de s'énerver, un bon whisky berbère pour discuter, le soleil, un ventre bien rempli et Inch Allah c'est une bonne vie : c'est-ce que nous a expliqué notre accompagnateur Omar, lorsque nous étions dans les dunes de Chigaga.

Après une dernière promenade dans la palmeraie, nous reprenons la route qui va nous conduire à la vallée du Tafilalet, beaucoup plus à l'est. Comme nous comptons faire la vallée du Dadès au retour, nous prenons la route qui passe par le désert : quelques palmeraies et donc quelques villages, sinon l'erg noir avec les montagnes du Djebel Sagrho en arrière plan.


Nous faisons une halte d'une journée à N'Kob dans un camping où nous sommes seuls (!)


nous nous promenons dans la petite palmeraie

puis nous continuons notre route le long du désert,


jusqu'à Merzouga, au pied de l'erg Chebbi, ou plutôt le village juste avant, Hassi Labied, où nous nous arrêtons à une auberge camping : là aussi nous sommes seuls. Nous avons les dunes en fond de décor : elles sont ici d'un chaud jaune orange doré et nous partons faire une petite promenade dans le village et dans les premières dunes. Ici aussi, les villages sont spécialisés pour les randonnées dans les dunes : hôtels, camping, locations de 4 x 4, de quad, balades en dromadaires … Il y a tellement de panneaux qu'on est un peu perdu !

Le lendemain, après un barbecue très réussi, nous attaquons l'ascension de la plus haute dune (environ 150 mètres) : il faut d'abord "avaler" les premières

puis enfin s'élancer par le meilleur angle possible. Enfin, nous voilà au sommet,


essoufflés mais contents : nous avons une vue superbe sur la vallée : les montagnes, puis l'erg noir, les villages et la petite palmeraie : enfin, le moutonnement des dunes à nos pieds. Encore une belle promenade et du sable plein les chaussures !


Le lendemain dimanche, nous décidons de renouveler notre expérience du dromadaire. Nous voilà à nouveau à califourchon sur nos montures pour une randonnée avec un jeune guide.

Pendant une heure, nous escaladons et descendons les dunes jusqu'à un petit campement ou nous dégustons un tajine arrosé d'un thé,

puis promenade - sur nos deux pieds - dans le désert à perte de vue (en réalité, l'erg Chebbi ne fait qu'environ 30 km de long sur 7 km de large) mais au milieu des dunes on ne voit que celles qui nous entourent ! En fin d'après-midi, retour à nos montures et nous admirons le coucher du soleil qui donne au sable une couleur orangée avant de redescendre vers le village.



Cette fois, nous avons notre comptant de dromadaire : 2 heures sur ces placides bêtes et mal au postérieur à l'arrivée ! Mais la promenade en valait la peine.
Le lendemain, nous revenons sur Rissani : c'est une ancienne capitale économique du Maroc et la première ville impériale du pays, sous le nom de Sijilmassa et c'est de là qu'est originaire la famille royale actuelle. Par la porte monumentale, nous rentrons dans la ville,


puis empruntons le parcours touristique de la palmeraie mais elle n'est pas en très bon état : la sécheresse et un parasite le "bayoud" causent d'importants dégâts. Nous nous arrêtons au village de Moulay Ismaël qui abrite le mausolée de Moulay Ali Shérif - fondateur de la dynastie des Alaouites - Nous nous promenons dans le patio - la mosquée et la chambre funéraire sont interdites aux non-musulmans : cette décision valable pour tous les édifices religieux du Maroc sauf la nouvelle mosquée Hassan II de Casablanca, a été édictée par le Maréchal Lyautey, lorsqu'il était résident général -


puis flânons dans le ksar Akhnouss, l'un des plus anciens du Maroc, avec ses murs en pisé et ses passages couverts caractéristiques.

Ici, les femmes portent un grand voile noir, comme nous avions déjà pu les voir à Tafraout, parfois avec des décorations qui varient selon les tribus, et qui leur couvre non seulement tout le corps et la tête mais quasiment tout le visage, sauf les yeux ou même un seul œil ! Les hommes eux sont moins nombreux à porter le chèche que dans la région de Zagora.

Nous continuons notre route en direction d'Errachidia par le Tafilalet, jadis une vaste oasis par où passaient les caravanes allant vers le sud. Aujourd'hui, elle est de plus en plus gagnée par la sécheresse … Nous faisons halte à Tissirt, petit village proche des gorges du Ziz, niché dans une belle palmeraie longeant la rivière.

Nous en profitons pour escalader la falaise qui borde la palmeraie ou coule le Ziz et nous irons demain voir les Gorges creusées par le fleuve en amont.


Nous quittons ainsi les régions d'extrême sud, avant de revenir sur Ouarzazate par la célèbre vallée du Dadès.