Bonjour à toutes et à tous






" le voyage pour moi, ce n'est pas arriver, c'est partir. C'est l'imprévu de la prochaine escale, c'est le désir jamais comblé de connaître sans cesse autre chose, c'est demain, éternellement demain"
Roland Dorgelès







lundi 14 mars 2011

Fès et le nord du Maroc


Avec 1,5 million d'habitants, c'est effectivement une très grande ville, en trois parties : la ville nouvelle, créée sous le Protectorat et qui se modernise à grande vitesse, Fès-el-Jedid édifiée au XIIIème siècle et Fès-el-Bali la plus ancienne. C'est donc vers elle que nous nous dirigeons, avec un guide cette fois. Fondée en 789 par Idriss 1er, descendant du Prophète, elle reçoit au cours des siècles des Espagnols expulsés de Cordoue, des Tunisiens chassés de Kairouan, des Juifs etc ... qui s'installent chacun dans leurs quartiers et créent ainsi un brassage culturel particulier à la ville. Elle est à son apogée entre les XIème et XIVème siècles : partout s'élèvent des mosquées, des foundouk - caravansérails - de riches demeures, des médersas - écoles coraniques - des fontaines et des portes, le tout richement décorés dans le style hispano-mauresque en marbre et faïences précieuses - les zelliges. C'est à cette époque aussi qu'est édifié Fès-el-Jedid où se trouve le palais royal et le méchouar.

La grande porte à l'entrée de la médina

Fès est à la fois la capitale intellectuelle du Maroc et une grande place artisanale, mais souffre en même temps, pour la partie ancienne, d'une dégradation importante : afflux de population venant des campagnes, mauvaise restauration, etc ... C'est donc vers elle que nous nous dirigeons : pas moins de 14 portes d'entrées, 225 mosquées, 250 hammams, 800 fours à pain et beaucoup de fontaines … de quoi se perdre ! C'est un dédale de ruelles, de passages, le tout encombré en permanence d'étals, de chevaux de livraison, de touristes aussi et bien sur de la population de la médina : plus de 200.000 personnes y habitent !

Difficile de s'y retrouver et nous passons d'une porte à une médersa


pour revenir à une mosquée, enfin nous parvenons au souk des tanneurs : on nous fait monter sur une terrasse pour regarder en contrebas - un brin de menthe aux narines pour supporter l'odeur - les artisans travailler les peaux : on les débarrasse d'abord de la laine, avant de les tremper dans des bacs remplis d'excréments de pigeons (!) et d'autres de chaux puis lavage et « essorage» dans de grandes roues en bois et enfin passage dans d'autres cuves contenant des colorants de diverses couleurs. Enfin, elles sont tannées et séchées. C'est assez impressionnant de voir cette façon de travailler à notre époque !

dans le souk des tanneurs























Nous visitons également un riad restauré par des Français : de l'extérieur, rien ne permet de deviner le raffinement intérieur : une élégante cour centrale


avec pièces de réception au rez-de-chaussée puis les suites au premier et la terrasse au-dessus donnant sur la medina : une belle réalisation !


Vue de Fès depuis la terrasse du riad

Puis c'est le foundouk des peaussiers où ils enlèvent les poils des peaux avant qu'elles ne soient tannées, avec leurs ânes de livraison qui crééent quelques embouteillages dans les ruelles !






















































puis, c'est le souk du henné, où l'on trouve tout ce dont on a besoin pour se teindre les cheveux, mais également les mains, puis les teinturiers, qui travaillent directement dans la ruelle,



tout comme les chaudronniers, que l'on entend avant de voir !



Vers midi, un peu sonnés par cette balade, et après le départ de notre guide, nous nous arrêtons pour déjeuner. J'ai oublié de dire que la médina est à flanc de colline : çà grimpe raide dans les ruelles ! L'après-midi, après un nouveau tour dans les souks,


nous nous dirigeons vers le mellah : l'ancien quartier juif, aux constructions assez caractéristiques


puis le palais royal avec sa porte monumentale.


Nous quittons là la partie ancienne pour rejoindre la ville nouvelle. Nous sommes éreintés et après un bon thé à la menthe, nous nous mettons à la recherche d'un petit taxi pour rentrer au camping.


Fès est beaucoup plus animée que Meknès et tout est «en plus grand» mais décidemment, les grandes villes ne sont pas nos visites préférées, même si Fès mériterait plus d'une journée pour être appréciée. Nous sommes néanmoins contents de retrouver la route et la campagne, même si cela signifie se rapprocher du départ !

Nous prenons donc la route en direction de l'est dans le projet de longer ensuite la Méditerranée après avoir vu un peu le nord-est du pays. Le temps est au gris et la circulation assez dense car c'est la seule route qui relie Fès à Oujda, à la frontière algérienne : un autoroute est en chantier mais n'est pas encore terminé. Nous longeons un lac

traversons des terres assez riches semble-t-il, avec dans certains endroits, beaucoup de vendeurs de légumes au bord de la route : courges, haricots, petits pois, oignons, carottes, tomates et oranges, parfois de véritables étals, parfois un simple cageot : nous nous arrêtons faire quelques emplettes,

puis faisons halte pour la nuit à Taourirt, où nous arrivons avec la pluie.

Nous décidons de pousser jusqu'à Oujda - la 6ème ville du Maroc - car il y a un garage Ford. Pégase fait un drôle de bruit au démarrage du matin et nous préférons en avoir le cœur net. Nous traversons à nouveau quelques paysages assez désertiques

et lorsque nous arrivons, le temps est gris et Oujda, une grosse ville : le garage nous propose de rester la nuit sur leur parking pour «ausculter» Pégase au matin. En fait, il n'a presque rien et nous reprenons la route, rassurés sur son sort !

Nous sommes déjà le 10 et nous devons avoir passé la frontière le 18 au plus tard, fin du visa. Nous prenons donc rapidement la route vers l'ouest et il nous faut aller jusqu'à Al Hoceima pour trouver un camping soit 260 km environ. C'est donc sous la pluie que nous entamons le retour : sur cette partie, la route n'est pas proche de la mer et présente moins d'intérêt touristique


les crevasses taillées par un oued dans la plaine du Gareb

d'ailleurs, depuis Fès, nous ne rencontrons qu'un ou deux camping-cars, c'est dire ! Puis nous commençons à grimper car nous arrivons aux contreforts du Rif : il ne fait pas chaud et il pleut de façon intermittente.



Pégase tout crotté dans le Rif

Arrivé à Al Hoceima, plus de camping ! Le plus proche est à une centaine de kilomètres.

Bien évidemment, nous aurions pu nous arrêter là et dormir sur un parking, mais nous décidons de poursuivre : nous sommes en milieu d'après-midi et la route est récente, nous devrions avoir le temps d'arriver. Les 50 premiers kilomètres sont avalés sans effort, mais la route se met à grimper de plus en plus, la nuit tombe et, cerise sur le gâteau, le brouillard nous «cueille» à environ 30 km du village d'El Jebha où nous comptons dormir. Nous avons parcouru cette distance à environ 20 km/h car bien souvent les lignes blanches n'étaient plus visibles et j'étais obligée de descendre et de marcher devant Pégase car on ne savait pas où était le bord ou le milieu de la route … Pour couronner le tout, dans les dix derniers kilomètres, des coulées de boue traversent la chaussée …. Nous croyons ne jamais y arriver, quand enfin, la route descend et nous arrivons dans le village, complètement stressés et éreintés.


Mais là, les problèmes ne sont pas terminés : le village est lui-même dans la boue qui dévale de la montagne par coulées, nous sommes dans la gadoue jusqu'aux essieux : impossible d'arriver au parking car les rues sont coupées. Nous poussons jusqu'à la gendarmerie : ils nous prennent pour des fous d'être venus par un temps pareil et nous disent de repartir dès l'aube, et par la même route que nous venons de prendre, car les autres sont coupées, toujours par des coulées de boue et ne peuvent être dégagées dans l'immédiat.

Nous réussissons à avoir une petite place - sur un sol mi béton mi débruits de toutes sortes - près de la sortie du village. Il pleut toujours et nous craignons de nous retrouver embourbés … et donc bloqués ici. Nous passons la nuit tout habillés, en nous relayant à surveiller le temps, près à bouger, au cas où … A 5 heures du matin, un bon café et dès que le jour commence à se lever, nous prenons la route : nous n'aurons rien vu du village, hormis la boue et les gens en blousons et bottes pataugeant à qui mieux mieux dans cette gadoue.

El Jebah vu de la route en repartant

Cà fait un drôle d'effet de voir la route «faite» la veille dans le brouillard ! Nous retrouvons les coulées de boue, bien sur,






mais aujourd'hui, nous voyons également les précipices. Ce n'est pas de la haute montagne, mais elle est très pentue : nous sommes bien contents de repartir avec heureusement, pas ou peu de brouillard


mais la pluie par intermittence. Nous décidons cette fois d'éviter la montagne et refaisons donc le chemin en sens inverse : Al Hoceima, en longeant les contreforts du Rif


puis Nador en dessous de Melilla pour revenir au parking de Taourirt : Pégase est complètement crotté et boueux, dedans comme dehors ! Puis à nouveau la route vers Fès ou nous arrivons le 12 toujours avec la pluie : beaucoup de villages et même de villes n'ont pas toutes les rues goudronnées, ce qui donnent très rapidement d'énormes flaques et de la gadoue partout.

Lors d'un petit arrêt dans la campagne ...

Après cette courte halte, nous reprenons notre progression vers le nord et prenons la route pour Chefchaouen. Hormis la route longeant la Méditerranée où nous avons été bloqué, c'est la seule destination «touristique» avant Tanger. Ce sera donc notre dernière halte avant de reprendre le bateau … Nous arrivons en milieu d'après-midi après un trajet sans histoire, alternant nuages et soleil et la pluie nous accueille à l'arrivée.


La vue de la ville à l'arrivée est superbe : elle s'étage entre deux montagnes en forme de cornes - dont elle tire son nom : «regarde les cornes» en berbère - avec sa partie ancienne - la plus haute, toute en bleu et blanc. Nous grimpons jusqu'au camping qui domine la ville et peu à peu, tout est noyé sous la pluie, le vent est froid et l'humidité nous transperce.


Il va pleuvoir une bonne partie de la nuit et au matin les nuages enserrent les sommets pendant que le brouillard se répand dans la vallée. Nous profitons d'une amélioration vers 10 h pour descendre par un petit escalier jusqu'à la ville.


Chefchaouen vue du camping

Comme dans toute les villes, la médina est un entrelacs de petites ruelles où nous nous glissons au milieu des échoppes et des petits étals des fermières du Rif venues vendre leur production de légumes.


Toute la médina est blanche avec les linteaux des portes, fenêtres et les bas des murs peints en bleu,


parfois même les sols de certaines ruelles.


Ce doit être très beau au soleil, mais aujourd'hui il n'est guère de la partie. Vers midi, nous nous réfugions dans un café car il pleut à verse, puis une amélioration nous permet de continuer notre balade.



Nous rentrons malgré tout assez tôt au camping car nous sommes gelés ! Puis, c'est de nouveau orage avec pluie et re-pluie tout le reste de la soirée. Espérons que demain la route ne sera pas trop mauvaise, car nous sommes toujours dans les montagnes du Rif. Et voilà pour notre dernière visite : demain, c'est Tanger Mèd pour l'embarquement. Espérons que la mer sera calme !